Concernant la batterie, ma méthode de prise de son préférée reste celle qui mélange les deux techniques. Lorsque je le peux, lorsque j’ai de nombreux capteurs à ma disposition, que la pièce est très spacieuse, je vais utiliser conjointement les deux approches et soigner mes « ambiances », (des micros totalement consacrés à la sonorité de la pièce de prise. Ils ne sont utiles que dans les volumes moyens et importants)

Ici, dans cette grande pièce du studio Opus, les U67 et le AEA stéréo à ruban sont dédiés à la captation des ambiances

Finalement un couple ORTF en Shoeps sera retenu et je préfèrerai 2 autres Shoeps aux U67 d’origine. On le voit, la captation du son de la pièce est primordiale!

Evoquons donc un peu ces micros de proximité et tordons d’entrée de jeu le cou à une idée reçue trop répandue. Les statiques sont parfaitement adaptés à la prise de la batterie. Ils sont souvent très résistants aux pressions acoustiques élevées, précis et très performants dans la totalité du spectre. Ils sont simplement plus coûteux que la majorité des micros dynamiques, ils sont plus fragiles et leur sensibilité n’est pas strictement indispensable à une prise de qualité, hors cymbales et charley, bien sûr ! C’est pour ça qu’en général, vous les rencontrez un peu moins sur les fûts

En revanche, lorsque vous avez un parc très complet sous la main…pas de raison objective de se priver ! Dans cette prise très haut de gamme, la grosse caisse était prise par une plaque SM91 Shure, (à l’intérieur), par un U47 FET et un SKRM100 Sub-Kick Yamaha, (Oui, oui, le fût bleu qui ressemble à un petit tom est un micro !!!). J’avais opté pour un M149 sur la caisse claire, des TLM170 sur les toms, un couple A/B de Shoeps que l’on ne voit pas sur la photo. Souhaitant pouvoir restituer cette pièce d’exception, j’avais confié les ambiances à 2 U67 Neumann et un AEA R92 stéréo à ruban) tous, placés très haut au dessus du set

Comme beaucoup d’ingénieurs, il m’arrive souvent de prendre une caisse claire avec un shure sm57. S’il remplit bien son office et délivre un son nerveux et droit, je peux parfois lui préférer un AKG 414 lorsque je veux « rendre » la particularité d’une caisse claire bois, un peu profonde…
Quoi qu’il en soit, les capteurs choisis doivent être appareillés par familles. Les toms, par exemple, seront plus homogènes s’ils sont équipés de mêmes références. Mais pour conserver cet « air de famille » il faudra respecter des distances et dispositions identiques. Des distances inférieures à 10 cm entre la peau et la capsule, donnent globalement un bon rapport entre isolation et rendu. Sur des peaux neuves et des fûts très sonores, vous pourrez vous situer plutôt dans la marge haute, entre 5 et 10 cm, afin de conserver du naturel au son. N’oublions pas qu’en nous éloignant un peu de la source, on permet à l’onde sonore du grave de se développer un peu plus !

Dans notre exemple d’aujourd’hui il nous a fallu nous rapprocher un peu pour redonner du tonus à nos peaux un peu usagées… N’attendez pas de miracle de cette méthode, toutefois ! Placer ses micros plus au bord d’un fût lui fera perdre un peu de profondeur et favorisera l’attaque.

Cette figure illustre bien l’incidence de la position du micro sur le contenu harmonique de la vibration de la peau. Placé en son centre, le micro pourrait valoriser F1, la fondamentale, (la fréquence la plus grave). A la verticale du rayon, c’est le premier harmonique, F2,ou l’octave supérieure qui sera favorisé. Au bord de la peau, enfin, le spectre basculera vers les harmoniques plus élevées et donc plus aigues.

 

En faisant abstraction des contraintes liées au jeu, (les baguettes du batteur, en l’occurrence), l’idéal serait de rechercher le contenu le plus plein et donc « la verticale du centre de la peau » !! Oui, je sais… pas très réaliste ! Bien entendu, c’est strictement théorique car cela ne tient pas compte de la gène occasionnée au batteur et de la protection de vos précieux capteurs. Ils n’aiment définitivement pas prendre des coups de baguettes ! Le bon placement, comme souvent en prise de son, relève donc un peu de l’art du compromis ! Un batteur qui joue avec des cymbales un peu « hautes » vous facilitera la vie car la séparation physique réduira la diaphonie entre les parties « métal » et « peau » de l’instrument. Le son des cymbales dans des pistes de toms un peu « aiguisées » est insupportable et reste un ennemi à battre !

 

Parlons fixation

Contrairement à la scène, vous n’avez pas d’impératif de discrétion; profitez-en et choisissez de grands pieds de micro, lourds et contrebalancés qui permettent des déports importants et donc, un placement sans contrainte. Préférez des micros qui ne sont pas fixés sur des cerclages afin de gagner du grave naturel, non parasité par les vibrations. Pour la même raison, n’oubliez pas d’utiliser des suspensions élastiques chaque fois que c’est possible.

 

Le kit type

Voici quelques exemples de micros adaptés à chaque élément. Il faudra surtout retenir les caractéristiques principales de ces choix qui peuvent être déclinés vers de nombreuses références.

Grosse Caisse : Neumann U47 / Sennheiser MD421 et MD441 / Electrovoice RE20-PL20 / Shure SM91, Beta 56, AKG D112, D12 et … j’utilise même un vieux D24

Caisse claire : Shure SM 57 / MD441 / AKG C414

Charley et over-head: Neumann KM – Shoeps – AKG C460 451 – Shure SM81 Royer

Toms : MD421 et MD441 – SM 57 – et plus généralement, statiques à diaphragmes larges

En dehors du fait d’éviter absolument toute forme de chocs, l’entretien des micros consistera essentiellement à chasser l’humidité et la poussière… Il ya quelques années, je vous aurais également parlé de nicotine ; ce n’est plus d’actualité et c’est tant mieux car les micros ont beaucoup souffert des cabines enfumées !  Une session batterie qui s’étale sur plusieurs jours devra vous conduire à couvrir vos précieux micros sinon à les démonter la nuit du fait de la condensation, toujours présente lors des changements de température dans des locaux très fréquentés et hermétiques.
Il est important de voir la batterie comme un ensemble d’instruments joués ensemble plutôt que comme un instrument unique. Chacun des éléments qui la composent ont longtemps été des instruments indépendants à part entière. S’il faut valoriser chacun d’entre eux. On ne doit pas perdre la cohérence de l’ensemble.

Un grand merci à Jean-Marc Gougé pour son accueil et merci à Benjamin Jouet pour son professionnalisme et sa patience !

Voici la vidéo qui résume un peu cette journée autour de la batterie!