Suite de l’excellent « article invité » de Léo Chupin, (instagram)  (Captain Chup’ sur les réseaux sociaux!)

Léo nous parle aujourd’hui du M50 qui constitue une cas très particulier dans la gamme Neumann. Je me permets d’introduire un peu ce deuxième volet…

Sous les apparences d’un diaphragme large, se cache en fait un micro à petit diaphragme de 12mm en titane enchassé dans une sphere en PVC de 40mm. De base, ce micro est omnidirectionnel mais du fait de sa fabrication et de la présence de cette sphere de diffraction bien particulière, le comportement directif du M50 est un peu bousculé!

Les lois qui régissent l’acoustique nous disent qu’un obstacle n’est visible par une onde que lorsque la plus petite dimension de cet obstacle est supérieure à la longueur d’onde (λ) considérée. Pour obtenir la fréquence à partir de laquelle la sphere va modifier la directivité, nous appliquerons la formule

F=(la célérité ou « vitesse du son » à 20° au niveau de la mer soit 342) / λ (=0,04m)

F=C/L = 8550 Hz.

Nous savons donc qu’à partir de 8500Hz environ, la sphere du M50 rendra le micro un peu plus directif tout en lui conservant les caractéristiques de profondeur d’un micro omni. En dehors d’une préaccentuation du registre aigu, d’une très bonne sensibilité et d’un bruit propre très faible, voici l’explication de son utilisation prioritaire en musique orchestrale.

Le M50 par Léo Chupin

1950

Un M50 avec son alim N52t, sa suspension MZ49 et ses câbles (remarquez la fiche S67 qui contient toutes les connectique (électrique, sortie du micro et sortie niveau micro)

Produit de 1951 à 1971, Le M50 est un micro omnidirectionnel à petite membrane utilisant le même boîtier, la même électronique et la même lampe (la MSC2 puis l’AC701) mais pas la même capsule que le M49.

En effet le M50 est équipé d’une capsule omnidirectionnelle de petite taille KK50 d’abord en PVC puis aluminium, en nickel (utilisé sur toute la série KM50) et enfin en mylar (au même moment que pour la série des KM 80). La capsule est entourée d’une sphère de plastique très particulière qui crée un shelve de +5db vers 2,5 Khz

Ce boost a été pensé pour rendre le micro plus linéaire lors des prises à distance notamment pour les orchestres. Il s’agit donc d’une capsule dite de « champs diffus » (à la différence des capsules de champ direct – atténuation des hautes fréquences- et de champ libre -droit-). Cela rend également le micro plus directionnel en fréquence : la prise est omnidirectionnelle mais de plus en plus directive dans les aiguës.

  • M49
  • M50

Les M49 et M50 sont d’apparence parfaitement identiques, le seul moyen de les différencier est le petit bijou : rouge sur le M49 et blanc sur le M50. En regardant de très près à travers la grille on peut bien sûr observer la taille de la capsule. Le M50 partage tous les accessoires du M49.

On remarque bien la directivité du M50 avec des graves proche de M49 en Omnidirectionnel et des aiguës plus proche de M49 en cardioïde !
On remarque bien le shelve dans le haut du M50

Les évolutions du M50 :

  • M50
  • M250

Le M50 a connu différents modèles et évolutions :

– Le M50a : en 1952, la capsule est changée par une KK53 en aluminium.

– En 1954, la MSC2 est remplacée par la AC701K.

– En 1963, le M50b : quelques modifications électroniques sont apportées (valeurs de résistance etc)

– En 1965: la capsule est changée par une KK83 en Mylar.

– Le M50c : la “filament topology” du circuit d’amplification est changé, baissant le bruit de fond de 4db.

Comme pour le M49, il existe une version pour le broadcast allemand avec une prise Tuchel 7 pins nommé M250.

Le M50 était difficile à fabriquer et souffrait d’un fort taux de réjection.

Il existe des versions micro de mesure nommées MM3U et MM5 avec un transfo BV14.

Le M50 Fet

Le studio Decca de Londres a converti de nombreux M50 de leur collection en version à transistor FET pour pouvoir fonctionner avec du 48v et pallier l’éternel crise des lampes Telefunken. Evidemment, ces micros ne sonnèrent jamais comme les originaux et la plupart furent vendus. On en retrouve parfois sur le marché de l’occasion. Il existe différents schémas, certains très mal assemblés.

C’est pas joli joli !!
Le classique avec une AC701 pour comparaison

Un son unique

A mon humble avis, si le M50 règne toujours en maître sur l’arbre Decca et les prises de « rooms » c’est grâce à cette directivité si particulière : en comparaison le M49 quand il est utilisé omnidirectionnel devient bidirectionnel dans les aiguës et capte donc tout un tas de réflexions. Cela qui peu tendre à réduire la transparence et la précision de la source.

Le M50 capte ce qu’il faut ou il faut.

Il va par exemple cibler et localiser précisément les aiguës des violons mais capter le reste du spectre de l’instrument de manière uniforme : dans l’axe mais également son « son global » dans la pièce.

De plus, le haut du spectre est dans le shelve, il est donc « amplifié » par rapport au bas. Les réflexions de pièce sont donc concentrées dans le « bas » mais captées à un niveau inférieur aux aiguës.

Tout cela tend à un équilibre de la captation : Le M50 capte ce qu’il faut où il faut de manière naturelle.

C’est en réalité le seul micro à ma connaissance qui a une directivité variable en fréquence. Cette directivité si particulière lui permet de jouer sur tous les tableaux.

Dans un arbre Decca il combine ainsi les qualités des différents couples stéréo : précison, largeur et profondeur !

Pour Conclure

Avec moins de 1000 unités fabriquées, le M50 est encore plus rare que le M49. Estimés entre 8000 et 15000 euros, ils sont souvent en sets de 3 ou de 5.

Étant donné son prix et son utilisation il est assez rare dans les studios d’enregistrement :

-Principalement utilisés dans des arbres Decca pour des orchestres, son utilisation est souvent restreinte aux grands studios équipés de plateau conséquent pouvant accueillir des orchestres complets. Par exemple, les studios Abbey Road (référence de la musique de film) en possèdent 17!!!

-Pour un arbre Decca de M50, comptez plus de 40 000 euros avec la coûteuse structure permettant de les installer correctement (environs 1000 dollars chez AEA, Grace Design Ambient ou Sabra Som).

Double arbre Decca au studio AIR à Londres : Sortez votre chéquier ! (Joli mélange de suspension MZ49 et Câbles C28 !)

Utilisation :

On trouve donc principalement le M50 sur des arbres Decca mais aussi pour des rooms et parfois pour des voix.

Leur avis :

« A must for big rooms, especially for classical Decca trees. »

Hans Martin Buff

« Une merveille!!! L’essayer c’est l’adopter… un vrai-faux omni qui, grâce à sa sphère de diffraction, devient doucement directif dans l’extrême aigu. Il partage cette caractéristique avec le M150, son successeur et reste mon premier choix absolu pour la matière purement acoustique et les ensembles dans des lieux qui sonnent! C’est avec lui que les arbres Decca sont les plus beaux et les plus larges »

Pierre Jacquot

« This mic got and outstanding omnidirectional pattern. The Neumann M50 is probably the wold’s best orchestral microphone. My matched M149s are excellent, too, but on orchestra in a Decca tree configuration, the M50s are superior. The best way I can describe the sound is « wide open ». If you’re working in a huge soundstage, it can capture that sound and make it sound just like you’re there. »

Bruce Sweden

La lampe AC701K

Comment parler des M49 et M50 sans parler de la « célèbre » AC701?

Les M49 et M50 sont les premiers micros à utiliser l’exceptionnelle AC701. Une lampe primordiale dans l’histoire de Neumann et de l’histoire avec un grand H du microphone.

Encore une lampe Telefunken mythique au destin tragique. Elle est le résultat d’une collaboration entre Telefunken et la Rundfunk (la radio allemande). Contrairement aux autres lampes vues ici (VF14 puis bientôt l’EF86), cette lampe a été développée uniquement pour être utilisée dans des micros. Elle a donc des spécificités techniques d’exception qui fait tout le son des micros l’utilisant. Elle se démarque nettement de toutes les autres lampes.

On la retrouve entre autre dans les KM53/54/56/64/66, SM2, M49, M50, M249, M250, M269, M367, SM69 ainsi que dans Schoeps M211, M222, les AKG C12 et les Telefunken ELA M251 (la version 251E pour les USA a une autre lampe). Des micros qui partagent tout ce son “naturel” et “précis”.

L’AC701 est parfois nommé AC701K, ce K que l’on retrouve aussi sur d’autres lampes Telefunken correspond à « Klinkel frei » qui signifie « sans distorsion » ou « sans clic ». Il s’agit théoriquement des meilleures lampes.

Peu d’informations sur les dates de fabrication, mais apparemment la nomenclature “K” disparaît en 1965, car atteignant une qualité “K” pour toutes les lampes.

RFT fabriqua également des AC701 mais beaucoup plus bruyantes. Elles sont marquées d’un point blanc. Les lampes Telefunken de meilleure qualité sont marquées d’un point rouge. D’où l’appellation « Red dot » pour les meilleures lampes.

L’histoire de l’AC701 suit de près celle de la VF14 : face à un grand nombre de rejets, la production s’arrêta.

Une AC701 peut durer plus de 10.000 heures mais si elle est « surchauffée » sa durée de vie peut basculer à 2 semaines ! Il faut vérifier dans l’alimentation que la partie qui est chargée du chauffage du filament, envoie bien 4 volts au micro. S’il envoie 0,2 volt de plus cela peut endommager et détruire la lampe très rapidement. (Merci l’atelier du microphone)

Sur Ebay, elles sont vendues entre 500 et 2000 euros, mais l’achat d’une AC701 vintage est risqué : il est impossible de savoir dans quel état est la lampe! Même une NOS (New Old Stock : lampe neuve jamais utilisée) peut avoir du souffle. K ou par K, point rouge ou point blanc. Tout cela est bien mystérieux et il y a de nombreuses arnaques. Il est parfois nécessaire d’en tester des dizaines pour en trouver une possédant les caractéristiques techniques nécessaires pour une utilisation en studio.

Quel prix pour une lampe qui a déjà été utilisée?
Quel prix pour cette contrefaçon?

Drefahl Audio a développé une AC701-FD, et Phaedrus en propose des réédition entre 200 et 300 euros d’une qualité incroyable. On trouve également des modèles russes de qualité… questionnable.

Drefahl Audio AC701-FD
Phaedrus AC701

Micros Neumann en « U » et Micro en « M »

Difficile de trouver des informations juste et précises sur le sujet mais Neumann a décidé que les micros large membrane en « M » désigneraient les micros avec des lampes AC701K (M49, M50, M269, M367 et qui peuvent donc fonctionner sur les mêmes alimentations.

Les micros en « U » désigneraient les micros larges membranes utilisant d’autres types d’amplification (lampe et fet : U47, U47 fet, U67, U87, etc).

(KM correspond aux micros petites membranes de format “crayon” et TLM les, modèles sans transformateurs).

 

Nous retrouverons bientôt « Captain Chup » pour son tout dernier volet à propos de la microphonie dédiée à l’orchestre et tout spécialement à l’arbre Decca.  Domaine de prédilection du M50.